L’intelligence artificielle en santé : révolution clinique ou défi éthique ?
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Résumé
Parmi les bouleversements majeurs qui redessinent les contours de la médecine moderne, l’intelligence artificielle (IA) occupe actuellement une place centrale. Entre engouement technologique et réticence déontologique, elle représente à la fois l’espoir d’une médecine plus prédictive, plus précise, plus personnalisée, et les craintes d’un système de soins sans ces acteurs humains avec le risque de décision biaisées
Le concept d’utilisation des ordinateurs pour simuler un comportement intelligent et une réflexion critique a été décrit pour la première fois par Alan Turing en 1950. Dans le livre Computers and Intelligence, Turing y présente un test simple, qui sera plus tard connu sous le nom de « test de Turing », afin de déterminer si les ordinateurs étaient capables d’intelligence humaine.
Six ans plus tard, John McCarthy définit le terme intelligence artificielle (IA) comme « la science et l’ingénierie de la fabrication de machines intelligentes ».
Dans les années 1970, apparaissent les premiers systèmes experts médicaux comme MYCIN, utilisé pour diagnostiquer des infections sanguines et proposer des antibiotiques adaptés. Les décennies suivantes voient l’émergence d’algorithmes d’apprentissage automatique, utilisés pour analyser des données médicales et soutenir le diagnostic. Dans les années 2000, l’IA progresse grâce au développement des bases de données électroniques et de la puissance de calcul, permettant des avancées en imagerie médicale et en prédiction de maladies (1).
En médecine, l’IA a fait ses preuves dans plusieurs domaines: interprétation d’images médicales, triage automatisé, gestion des flux hospitaliers, ou encore aide à la détection de pathologies complexes, y compris durant la pandémie de COVID-19. Des algorithmes ont ainsi permis de diagnostiquer plus rapidement des cas de pneumopathie virale, d’optimiser la recherche de médicaments, voire de prédire l’évolution épidémique (2).
L’intégration des outils basée sur l’intelligence artificielle en pharmacie ouvre de nouvelles perspectives, de la dispensation automatisée à la pharmacovigilance proactive en passant par la personnalisation des posologies, toutes les étapes de la sécurisation du circuit du médicament sont concernées par cette évolution (3).
La médecine dentaire n’est pas en reste par rapport aux autres disciplines, l’IA permet d’améliorer la précision des diagnostics grâce à l’analyse automatisée des images, elle facilite la détection précoce des caries et des pathologies buccales, et optimise la planification des traitements en implantologie, orthodontie et endodontie. Elle améliore également la personnalisation des soins en fonction des risques individuels du patient (4).
Mais à cette avancée technologique s’oppose un vide inquiétant. En effet, aucun cadre juridique international ne régule encore l’usage de l’IA dans la pratique médicale. Qui sera responsable en cas d’erreur diagnostique générée par un algorithme ? Le praticien, l’éditeur du logiciel, ou le développeur ?
Le fonctionnement de ces outils comme « boites noires », ne permet pas de convaincre les décideurs sur leur fiabilité, qui ne savent pas comment cette intelligence artificiel produits ses résultats et à partir de quelles données
L’essor de l’IA repose sur une matière première importante : les données de santé. Ces dernières, souvent collectées sans consentement éclairé suffisant, sont la cible de nombreuses convoitises industrielles où l’éthique n’est pas toujours respectée (5).
L’IA n’est pas une menace pour la pratique médicale, on ne peut nier que ce progrès représente un gain de temps, une réduction des coûts, une meilleure accessibilité aux soins qui sont des enjeux majeurs dans des systèmes de santé sous tension. Mais cette IA ne se substituera jamais au praticien, mais réoriente sa fonction vers le jugement clinique et la décision partagée.
L’IA ne remplacera jamais les professionnels de santé, mais les professionnels de santé qui maîtrisent l’IA remplaceront ceux qui ne la maîtrisent pas !
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Références
- Kaul, V., Enslin, S., & Gross, S. A. (2020). History of artificial intelligence in medicine. Gastrointestinal endoscopy, 92(4), 807-812.
- Zarei, M., Mamaghani, H. E., Abbasi, A., & Hosseini, M. S. (2024). Application of artificial intelligence in medical education: a review of benefits, challenges, and solutions. Medicina Clínica Práctica, 7(2), 100422.Chalasani, S. H., Syed, J., Ramesh,
- M., Patil, V., & Kumar, T. P. (2023). Artificial intelligence in the field of pharmacy practice: A literature review. Exploratory research in clinical and social pharmacy, 12, 100346.
- Ghaffari, M., Zhu, Y., & Shrestha, A. (2024). A review of advancements of artificial intelligence in dentistry. Dentistry Review, 100081.
- Savulescu, J., Giubilini, A., Vandersluis, R., & Mishra, A. (2024). Ethics of artificial intelligence in medicine. Singapore Medical Journal, 65(3), 150-158.